En février 2014, un homme figurant dans le classement Forbes a pris la tête de la Fédération russe des échecs. Après un temps d’attente, nous nous sommes invités chez Andreï Filatov, 43 ans, afin de nous entretenir avec lui.
Le milliardaire nous a proposé de nous rencontrer sur le boulevard Gogolevski, dans le Musée des échecs dont il a financé la restauration.
En regardant autour de nous, une question a surgi :
– Dans quel objet exposé ici trouvez-vous une énergie particulière ?
– C’est dommage, le casier derrière vous est fermé. Il contient le jeu d’échecs d’Alekhine. Lors de l’ouverture du musée, Valentin Lyskovtsev est venu et il l’a offert en disant "C’était son dernier jeu. En quittant la Russie, Alekhine l’avait remis à mon grand-père."
– Un jeu de voyage, dans une boîte en fer ?
– Non, non. Je lui ai demandé comment ces échecs s’étaient retrouvés en possession de son grand-père. Il m’a répondu : "Nous vivions sur le même palier. Ici à telle adresse. Alekhine nous a même laissé des meubles…"
– Combien un tel jeu d’échecs coûterait-il ?
– Pour un joueur d’échecs, cela n’a pas de prix, et il a d’ailleurs été offert gratuitement au musée. Il dégage une énergie fantastique.
– Quels objets liés aux échecs avez-vous cherché à obtenir, en vain ?
– Je ne vise rien pour le moment. Mais ça ne coûte rien de rêver. Par exemple, la collection tout à fait unique d’Anatoli Karpov.
– Parlez-vous des collections de jeux d’échecs ?
– Et des timbres consacrés aux échecs.
– En avez-vous parlé avec lui ?
– Non. Mais qui sait, peut-être qu’un jour ou l’autre… La collection de Karpov serait du plus bel effet dans n’importe quel musée.
– Les rencontres les plus curieuses de votre vie avec de grands joueurs ?
– Je suis allé à un tournoi à Podolsk pour soutenir mon camarade d’université Ilya Smirine. Il jouait contre Mikhaïl Tal. Et Tal n’avait pas de cigarettes !
– Et alors ?
– Tout au long de la partie, je lui ai offert les miennes, et on a discuté de la façon dont Ilya jouait aux échecs. Nous avons convenu que ce n’était pas mal. Mais Tal a gagné. Ce n’était pas longtemps avant sa mort. On sentait qu’il était très malade.
– Vous fumez toujours ?
– J’ai arrêté il y a plus de vingt ans.
– Vous avez solennellement décidé de vous arrêter ?
– J’ai fait un pari avec un ami.
– Avez-vous parfois eu envie de recommencer à fumer?
– Lorsque l’on boit de l’alcool ou du café, on a toujours envie d’une cigarette. Mais je me retiens.
– Et si vous aviez l’occasion de rencontrer n’importe quel joueur d’échecs du passé, qui choisiriez-vous ?
– Alekhine, bien sûr. J’ai beaucoup pensé à lui. Et plus tu penses, plus il y a de questions qui surgissent. Entretenait-il des relations avec les services secrets soviétiques ? Et si oui, quelle était leur nature ?
– Votre version?
– Je suppose que ces relations étaient très sérieuses. Alekhine était un homme courageux. A cause de son cœur, il n’avait pas été pris dans l’armée. Il s’est malgré tout porté volontaire comme infirmier et il a participé à la Première Guerre mondiale, il a reçu l’Ordre de Stanislav, deux médailles.
En outre c’était le petit-fils de l’un des hommes les plus riches du pays : Prokhorov, qui possédait la manufacture Trekhgornaïa. Son père était un homme opulent de la province de Voronej, mais il a pris parti pour la Révolution. Sa famille a activement coopéré avec les bolchéviques. Alekhine s’est marié avec une compagnonne de route de Lénine, une citoyenne suisse, grâce à laquelle ils ont quitté le pays. Il était traducteur pour le Komintern. Or qu’est-ce que le Komintern ?
– Quoi donc ?
– Une puissante organisation terroriste révolutionnaire. En Russie, son frère et sa sœur étaient restés otages des autorités. Ils n’ont pas été victimes des répressions. Un autre point : les amateurs d’échecs ont ensuite été étroitement liés aux services de renseignement. Alekhine était membre d’un club aux côtés du légendaire Rudolf Abel. Savez-vous qui a écrit un livre sur le champion après sa mort ?
– Qui ça ?
–Le grand maître Hugh Alexander. Alekhine en parlait comme de son maître. Hugh Alexander était l’un des membres les plus secrets du renseignement britannique. Cryptanalyste et chef du projet Enigma, il déchiffrait les codes secrets allemands.
– La mort d’Alekhine recèle-t-elle un mystère, selon vous ?
– Je pense qu’elle était naturelle. C’était une époque difficile : beaucoup de stress, d’émotions … La vie était dure et on avait faim. Peu de gens s’intéressaient aux échecs.
– Le vieux monument sur sa tombe, en France, a-t-il été restauré avec votre argent ? Ou en a-t-on réalisé un nouveau?
– Un arbre était tombé, cela avait fissuré la dalle. L’ancien monument ne pouvait pas être restauré. Nous en avons donc installé une copie conforme.
– La dernière chose que vous avez découverte sur sa vie ?
– J’ai lu quelque chose au sujet d’une conversation avec Paul Keres lors d’un tournoi à Salzbourg en 1942. Il a demandé à Alekhine : "Qu’est-ce que nous allons devenir quand la guerre sera finie?"
– Qu’a-t-il répondu ?
– "Le résultat de la guerre est évident : les Allemands vont perdre. Alors on se rappellera de tous nos exploits". Il lui a recommandé de quitter le pays à la première occasion. Mais Keres a raté le bateau et est tombé entre les mains du NKVD, ils ont dit qu’il devrait aider Mikhaïl Botvinnik à préparer le tournoi pour le titre de champion du monde. C’est ce qui l’a sauvé.
– Avec quelles personnes intéressantes les échecs vous ont-ils permis de faire connaissance au cours de l’année passée, en tant que président de la Fédération russe ?
– C’était aux Jeux olympiques de Tromsø. Un membre de la FIDE, dont je ne me souviens pas du nom. Il était sourd de naissance, un Américain d’origine ouzbèke. Il a appris quatre langues. Sans rien entendre, il lit sur les lèvres. Il est financier à Wall Street. Il m’a dit : "Dans ma vie, je n’ai raté qu’une seule journée de travail. C’était le 11 septembre, et tous mes collègues de bureau sont morts. Je me suis longtemps demandé pourquoi Dieu m’avait gardé en vie. Peut-être était-ce pour que j’aide d’autres personnes handicapées ?". Cet homme se démène pour qu’une épreuve d’échecs soit incluse dans les Jeux paralympiques.
– Y a-t-il eu des situations où le Seigneur vous a protégé?
– En neuvième classe, je suis passé à travers la glace et suis tombé dans le Dniepr. On marchait avec un ami sur la berge, c’était à la tombée de la nuit, et on discutait de l’avenir. Il faisait particulièrement froid ce jour-là, moins 20. J’ai soudain pensé : et si je marchais sur le Dniepr, sur la glace ? Quand pourra-t-on encore le faire ? Allons-y !
– Le Dniepr n’était pas gelé, par un tel froid ?
– Il était pris dans les glaces. Mais il y avait les rejets des usines. Un courant chaud. La berge était à une cinquantaine de mètres. J’ai fait un pas en avant, et je suis tombé dans l’eau.
– Et votre camarade ?
– Il s’est dirigé vers moi et a failli tomber, lui aussi. Il a rampé en arrière. La glace était brisée, fragile. Quand on marchait dessus, on ne pouvait pas comprendre pourquoi elle craquait comme ça. La croûte de neige se fissurait-elle ? Quand je suis sorti de l’eau, j’ai tout de suite compris qu’il y avait deux options : aller vers l’avant, en brisant la glace. Ou aller vers l’arrière, en rampant dans le noir tout le long du Dniepr.
– Vous avez rampé longtemps ?
– Deux heures. Ironie du sort, je n’avais même pas froid. Au contraire, je transpirais à grosses gouttes. Je n’ai même pas attrapé un rhume. Mon ami est aujourd’hui un partenaire en affaires.
– Vos quatre heures de discussion avec Kirsan Ilioumjinov vous ont marquées. En quoi vous a-t-il étonné ?
– Par une histoire portant sur la façon dont il est intervenu devant des bouddhistes en Inde. Il a partagé son expérience des échecs et sa vision religieuse. Un million de personnes s’étaient rassemblées dans un stade pour l’écouter. J’ai du mal à imaginer à quoi ça ressemblait. Ilioumjinovdit toujours ce qu’il pense, il est d’une sincérité exceptionnelle.
– Le personnage le plus étonnant dans le monde des échecs ?
– Peut-être Vassili Ivantchouk. On m’a dit qu’il avait appris la langue turque en trois jours. À la télévision locale, il donnait des conférences sans interprète. Il a enseigné les échecs. Aux Jeux olympiques de Tromsø, Vassili n’arrivait pas à jouer, il était terriblement inquiet. Pourtant, avec une telle expérience, on pourrait penser qu’il réagirait avec plus de sang-froid à l’échec.
– Un personnage du monde des échecs qui vous a frappé par sa mémoire ?
– Smirine. Il connaît par cœur des centaines de chansons de Vizbora et de Vladimir Vyssotski. Uniquement le texte, il ne chante pas. Karpov a une mémoire phénoménale. Il me fascine par sa personnalité. Il traite chaque affaire avec un sens des responsabilités incroyable. Et c’est un collectionneur exceptionnel !
– Vous rappelez-vous de l’une de ses histoires ?
– Oui, au sujet de la Garde blanche de la Crimée. On y imprimait des timbres et des cartes postales qui étaient acceptées dans le monde entier. Ils se trouvent dans la collection Karpov. A Tromsø, il a organisé une exposition de timbres sur les échecsn et ça a suffi pour remplir une salle de taille respectable.
– Sur quoi vos yeux se sont-ils immédiatement posés ?
– Dès les années d’école, je collectionnais moi-même des timbres consacrés aux échecs. J’ai donc regardé avec attention. J’aime beaucoup les timbres sur le tournoi de Moscou en 1948, quand le champion était Botvinnik. Et le premier timbre sur les échecs, qui était bulgare. Je ne m’attendais pas à le voir chez Karpov. Toutefois, il a recueilli tous les timbres sur les échecs qui existent.
– Boris Spassky est aujourd’hui en Russie. Vous communiquez ?
– Oui, nous le soutenons. Malgré son accident vasculaire cérébral, il parle normalement et a la tête sur les épaules. Il m’a dit : "J’ai rêvé de Fisher. On discutait du meilleur enchaînement : e2-e4 ou d2-d4. Dans mon rêve, on en est venu à la conclusion qu’après tout, c’était le deuxième. Le pion est protégé par la reine…" C’était lors d’une réunion entre le président russe et les champions. Poutine est indifférent aux échecs. Il est allé à deux tournois : la finale du tournoi de la Tour blanche à Dagomys et le match Carlsen-Anand à Sotchi. Une grande attention est accordée aux échecs par le président du conseil de tutelle de la Fédération russe des échecs, Dmitri Peskov, ainsi que par le vice-Premier ministre Arkadi Dvorkovitch.
– Etes-vous en relation avec Kasparov ?
– Je ne l’ai rencontré qu’une seule fois dans ma vie, deux ans avant de devenir président de la Fédération des échecs. Un ami m’a appelé et m’a dit : "Kasparov veut parler avec toi". On s’est assis à quatre dans le café La Torre. Il y avait l’éditeur du magazine "64" Igor Bourstein, l’ancien président de la Fédération russe des échecs Alexandre Bach, Kasparov et moi. Le sujet de la réunion m’a frappé.
– Qu’est-ce qu’il voulait?
– Il a dit : "J’ai tout gagné dans les échecs, sauf les Jeux olympiques en tant qu’entraîneur. C’est mon rêve, et je suis prêt à diriger l’équipe…."
– Quel était le rapport avec vous?
– C’est ce que j’ai pensé, et Kasparov a continué comme si de rien n’était : "Je m’adresse à vous parce que vous êtes le futur chef de la Fédération russe des échecs". "Pour le moment, vous êtes le seul à le savoir. Je n’avais même pas imaginé une telle option", lui ai-je répondu.
– Qu’a-t-il dit ?
– Il a souri : "Non, je sais exactement comment les choses vont se passer. Alors, concernant les Jeux olympiques ?" "Mais cette discussion est sans fondement, je n’ai aucune intention de devenir le leader de la Fédération russe des échecs !"
– Comment expliquer une telle clairvoyance ?
– Comment pouvez-vous prévoir cela deux ans à l’avance ? Ou alors, après le match Anand-Gelfand à la Galerie Tretiakov, il a vu le niveau d’organisation et il a pensé à quelque chose, imaginé un enchaînement ?
– De quoi d’autre avez-vous parlé ?
– Kasparov voulait travailler dans l’équipe, et je me demandais comment concilier cela avec ses activités politiques. Il a dit "J’aime vraiment les échecs, c’est le plus important…"
– Comprenez-vous le Kasparov actuel ?
– Il me fait de la peine.
– Pourquoi ?
– C’est un joueur d’échecs, certainement pas un homme politique. Quand tu ne travailles pas selon ta vocation, ça saute aux yeux. Et le résultat est toujours déplorable.
– Vous pensez que Garry n’est pas encore lassé de la politique?
– Il a probablement eu de fortes incitations économiques pour jouer ce rôle. Je suppose que c’est par leur biais qu’il en est venu à la politique. Et puis il s’y est laissé prendre.
– Après une telle pause, il pourrait peut-être revenir au jeu d’échecs professionnel?
– Kasparov a pris sa retraite des échecs. Il a joué à Saint-Louis une partie avec Short, il a entraîné Carlsen… Ce serait formidable s’il ne popularisait pas les échecs en Amérique, mais en Russie. Qu’il transmette l’expérience aux enfants, qu’il participe aux séances.
Vous savez, j’ai demandé une fois au président arménien Sarkissian : "Pourquoi avez-vous fait des échecs un cours obligatoire ?" La réponse m’a stupéfié : "Des études ont montré que les enfants ayant obtenu leur diplôme de l’école d’échecs ne consomment pas de drogues. Un enfant apprend à travers le jeu à compter les enchaînements, y compris ceux qui peuvent avoir des conséquences tragiques."
– Ça alors !
– En Arménie, les échecs sont enseignés deux fois par semaine, et un programme de télévision spécial est diffusé. La toxicomanie des enfants dans le pays a fortement baissé. Un autre exemple : la Chine. Là-bas, à la suite des guerres de l’opium, presque toute la population masculine était accro aux stupéfiants. Ils ont connu une renaissance grâce aux échecs et au jeu de go. Ils se sont sauvés en tant que nation.
– Est-il réaliste de faire des échecs une matière obligatoire dans les écoles russes ?
– Et pourquoi pas ? Dans tous les cas, cela vaut mieux que de dépenser des sommes énormes pour lutter contre la toxicomanie des enfants.
– Kasparov ne vient-il plus en Russie ?
– Le président l’a invité à une réunion à Sotchi avec les champions. Il a refusé. Les craintes de Kasparov au sujet des menaces qui pèseraient sur lui sont considérablement exagérées. À mon avis, il n’a rien à craindre.
– Et vous vous êtes attribué le rêve de Kasparov…
– Oui, j’ai récemment décidé qu’à partir de janvier, je serai l’entraîneur en chef de l’équipe masculine.
– Pourquoi le désirez-vous ?
– On ne gagne pas ! Et j’ai une formation d’entraîneur professionnel. Après le Championnat du monde en Arménie, lors duquel nous n’avons pas remporté une seule médaille, j’ai pensé que je devais prendre le problème à bras le corps. Ce ne sera pas pire, tout simplement parce que ça ne peut pas être pire.
– Quelles sont les causes de la faiblesse de notre équipe ?
– Justement, il n’y a pas d’équipe. Il y a seulement quelques joueurs talentueux.
– Allez-vous être l’aise avec les nuances propres au jeu d’échecs ?
– J’ai remarqué à Tromsø que les problèmes de l’équipe étaient liés à la transition entre le milieu et la fin de la partie. Nos gars ont deux atouts : une bonne école de jeu et la technique. Tous sont fantastiquement bien préparés pour les ouvertures. A tel point qu’ils réfléchissent longtemps avant le premier coup : quelle ouverture choisir ? Ils se mettent dans de bonnes positions, mais ensuite, ils s’enlisent dans les erreurs.
– Vous avez étudié avec Boris Gelfand à l’Institut de Minsk d’éducation physique. Quel genre de personne est-ce ?
– Brillant dans tous les sens du terme. J’admire son éthique de travail, ses connaissances, son sens de l’humour. Boris m’a présenté à Miguel Najdorf.
– Il semble que vous auriez pu ne jamais vous rencontrer.
– Najdorf avait plus de quatre-vingts ans, il était très vieux. C’était l’apprenti d’Alekhine. Certains participants au tournoi résidaient à l’hôtel Octobre à Moscou. Je suis venu pour soutenir Boris. On s’est assis pour dîner et le vieil homme s’est approché. Najdorf spéculait sur les devises, il faisait de sacrés gains. Il était d’une humeur fantastique. Et le lendemain, il est parti pour Varsovie.
– Avez-vous reconnu Najdorf ?
– Non, bien sûr. C’est Boris qui m’a dit.
– Est-ce le premier milliardaire que vous avez rencontré dans les années 90 ?
– C’est une histoire passionnante. Mon ami devait prendre un avion pour des pourparlers en Thaïlande. Le même jour, sa fille devait donner naissance à un enfant. Au cours de la soirée, il a décidé qu’il n’irait nulle part, parce qu’il lui fallait aller à la maternité. Et je suis allé en Thaïlande à sa place.
– Brillant !
– J’étais d’humeur "créative", et j’ai accepté. Ensuite, c’est comme dans le film "L’Ironie du sort". Je ne me souviens pas comment j’ai passé le contrôle des passeports et je suis monté à bord de l’avion. Pendant la célébration, on était passés à la vodka maison ukrainienne bien forte, et j’avais la gorge en feu. J’avais une terrible envie de boire quelque chose de frais.
– Vous y êtes arrivé ?
– J’ai ouvert les yeux, je ne savais pas où j’étais. Intuitivement, j’ai suivi des gens dans le couloir, et à la fin j’ai vu une silhouette familière. Gelfand ! Avec une canette de Coca à la main. Je lui ai dit : "Boris, donne-moi un verre, où je meurs". Il se retourne : "Qu’est-ce que tu fabriques à Delhi ?" – "Qu’est-ce que tu racontes ? De quel Delhi tu parles ?" Puis j’ai regardé autour de moi. En effet, c’était bien Delhi.
– Par quel miracle Gelfand était-il là-bas ?
– Pour jouer un match contre Karpov. Et nous avions atterri pour faire le plein de kérozène.
– Et de là, direction Bangkok ?
– Oui, M. Win attendait là-bas. A cette époque, c’était le deuxième homme du pays après le roi de Thaïlande. Un milliardaire, président de Sahaviriya Group. C’est un énorme empire. Des aciéries, des ports, des réseaux de télécommunication dans toute l’Asie et l’Australie, des mines… En Russie, il achetait de l’acier. Je n’avais jamais parlé à un homme avec une telle vision du monde. Il en avait une perception totalement différente. Dans le même temps, c’était un homme modeste, très humble. Win nous a emmenés dans des restaurants fabuleux, et sur le bord de la route il s’arrêtait pour passer au fast-food. Il prenait du riz à un dollar et mangeait. Je n’oserais même pas manger dans de tels endroits.
– Votre chemin vers les millions a commencé de façon étonnante.
– Alors que j’étais étudiant, je transportais des marchandises russes vers la Pologne : fers à repasser, sèche-cheveux, moulins à café. Et le tournant a eu lieu grâce aux échecs. Je me suis rendu pour la première fois à Katowice pour un tournoi. Et il a soudainement été annulé. Je n’avais ni fers à repasser, ni moulins, et j’ai regardé comment les autres faisaient des affaires.
– Combien pouvait-on gagner en un seul voyage ?
– Au fil du temps, j’ai porté mon revenu jusqu’à 2.500 dollars par mois.
– Gelfand traînait également des fers à repasser ?
– Non. Boris, lui, jouait aux échecs. Il était loin de ces affaires-là. Quant à moi, j’ai mis les échecs de côté, et c’était parti…
– Pourquoi lesPolonaisvoulaient-ils nosmoulins à café ?
– Ils étaient bon marché. C’était à peu près la même histoire qu’à la fin de 2014 : le rouble a été dévalué, tandis que les prix sont restés les mêmes pendant un certain temps.
– Il fallait aller soi-même sur le marché et vendre?
– Oui. Je n’ai pas honte d’avoir été un marchand ambulant. C’est un travail difficile et dangereux. Les années 90 étaient synonyme de criminalité galopante, en Russie comme en Pologne. Mais j’ai eu de la chance, je n’ai pas eu d’ennuis sérieux. Mon intuition de joueur d’’échecs s’est quelquefois révélée d’une grande aide.
– Ilioumjinov nous a dit que durant les années 90, il avait assisté à des échanges de tirs. Avez-vous vécu une telle expérience?
– Dieu m’en a gardé. Après avoir fait de la vente ambulante, nous nous sommes lancés dans la logistique avec mes partenaires, en organisant des transports par chemin de fer. Presque immédiatement, nous avons commencé à travailler avec la holding Severstal. La société s’appelait Severstaltrans. Personne ne nous considérait comme une structure distincte. On pensait que nous étions l’entreprise de transports de la holding métallurgique. Par conséquent, on ne nous posait aucune question pendant les temps de troubles.
– Vous rappelez-vous du jour où vous êtes devenu millionnaire ?
– Non. Mais je me souviens que j’ai eu des occasions de le devenir, et que délibérément je ne l’ai pas fait. On m’a offert une somme de six zéros pour que je ne parte pas dans une entreprise indépendante. J’ai refusé.
– Vous êtes parti ?
– Oui, et je n’ai jamais regretté. Et j’ai obtenu mon premier million deux ou trois ans après.
– On dirait que pour vous, ce n’était pas un événement.
– Vous avez raison. J’ai continué à travailler comme avant. Après un certain niveau dans votre vie, rien ne change.
– Aujourd’hui, est-il plus difficile de devenir riche que dans les années 90 ?
– Plus facile. La compétition diminue.
– Vraiment ?
– La Russie est un pays immense. Une grande fertilité, de nombreux retraités. Mais la population active est peu importante. Le nombre d’entrepreneurs recule aussi. Analysez le classement russe de Forbes. Au fil des dernières années, elle a été renouvelée à 90%. Les noms de famille qui résonnaient il y a un certain temps sont complètement passés aux oubliettes.
– Par exemple ?
– Vladimir Vinogradov.
– Qui est-ce ?
– Vous voyez … Et c’était l’homme le plus riche du pays ! Le fondateur d’Inkombank. Je ne connais pas Vinogradov personnellement, mais je suis sincèrement désolé pour lui. En 1998, sa banque a fait faillite. Après l’assainissement, Vinogradov a versé de l’argent à tous les investisseurs. Il s’est ruiné et est mort à 52 ans d’un accident vasculaire cérébral.
– Percez-vous le classement Forbes comme une compétition ?
– En aucun cas ! Je n’ai pas de telles ambitions.
– Vous connaissez mieux la situation que les analystes bancaires qui composent la liste. Y a-t-il beaucoup de mensonges là-dedans ?
– Oui.
– À propos de vous ?
– On me surestime à chaque fois.
– Dans le dernier classement, vous êtes classé 112ème en Russie, avec une fortune de 850 millions de dollars. Savez-vous exactement combien d’argent vous avez ?
– Comment calculent-ils ? En évaluant la valeur des actifs publics. Nous possédions la société Globaltrans. Sa capitalisation boursière, en fonction des conditions de marché, a parfois varié entre 200 millions de dollars et plus de trois milliards de dollars. Mais pourquoi me soucier de savoir combien elle vaut en bourse, si je ne veux pas vendre ?
Et concernant les évaluations des analystes bancaires, Warren Buffett a eu des propos très sages. On l’a interrogé une fois sur les erreurs qu’il a commises en affaires, en lui disant que les analystes internationaux de Wall Street pensaient que vous avez vieilli, qu’il se trompait. Buffett a souri : "Vous avez souvent rencontré des analystes riches ?"
– Vous nous citez Buffett, mais nous vous citerons Galitsky : "Un homme d’affaires, c’est une espèce biologique spéciale. Deux, maximum quatre pour cent possèdent réellement un potentiel entrepreneurial." Etes-vous d’accord avec cette idée?
– Je vais vous dire ceci : dans les écoles de commerce et les instituts d’économie, on apprend peu de choses. On peut enseigner un artisanat. Mais l’esprit d’entreprise pur ne peut pas être enseigné. Soit vous avez cette fibre, soit non… En Russie, la grande majorité des gens riches sont des "héritiers".
– De qui ?
– De l’Union soviétique. Lorsque la privatisation a commencé, ils ont hérité des usines, des fabriques, des mines. Ils sont instantanément devenus riches, sans faire le moindre effort. Mais il y a un autre type de businessmen. Ils n’ont pas pris part à la privatisation, ils ont créé à partir de zéro de véritables empires. Dans mon esprit ce sont eux, les vrais entrepreneurs. Parmi eux, j’en relèverai deux : Guennadi Timtchenko et Sergueï Galitsky.
– Et vous ?
– Je suis aussi un entrepreneur. Mais un échelon en-dessous.
– Connaissez-vous Galitsky ?
– Non. Mais je sais qu’il est candidat maître en échecs, qu’il donnait des cours à l’académie de Krasnodar, et qu’il organise personnellement des sessions avec des footballeurs. Il est agréable de savoir que des gens comme Galitsky et Timtchenko sont accros au jeu d’échecs.
Avec Timtchenko, nous sommes des partenaires de longue date. En plus de notre coentreprise de transport, nous avons organisé le projet "Echecs dans les musées", qui a débuté avec le match Anand-Gelfand dans la Galerie Tretiakov.
– Les échecs intéressent-ils Timtchenko moins que le hockey ?
– Il aime le hockey, mais il n’oublie pas les échecs. Guennadi est très actif dans son soutien aux échecs, sa fondation sponsorise régulièrement la Fédération russe des échecs. Avec le soutien de la fondation, on met en place tous les programmes pour enfants de la FRE. Le programme "Echecs dans les musées" est désormais leur projet aussi. Lui-même, quand il prend l’avion, utilise un programme d’échecs informatique.
– Vous avez joué avec lui ?
– Deux fois. Les deux parties ont fini par un match nul.
– Une fois, vous avez joué aux échecs avec un homme d’affaires. C’est le prix du mazout qui dépendait de l’issue de la partie. Combien d’argent était en jeu ?
– Celui qui gagnait emportait plusieurs millions de dollars.
– Avec de tels enjeux, votre cerveau n’a-t-il pas commencé à vous lâcher ?
– J’étais nerveux. En face, il y avait un homme qui était assez fort aux échecs. Il a bien joué. Mais j’ai gagné la partie. On a croisé le fer pendant environ quarante minutes.
– Le rival était-il découragé ?
– Déçu. Heureusement, il n’avait aucune idée de ma formation aux échecs. Il était persuadé de me battre et n’admettait pas que le scénario puisse être différent.
– On dit que Boris Berezovski ne crachait pas sur le vin à un dollar. Quel est le moins cher que vous ayez bu récemment ?
– Le prix pour moi n’est pas un critère de qualité. Je peux manger un morceau chez McDonalds. C’est nocif, mais bon. Et il y a d’excellents vins à un dollar.
– Quand avez-vous commencé à collectionner les peintures ?
– Il y a longtemps. Pour ma collection personnelle, j’achetais les travaux d’auteurs contemporains, et ce qui se créait avant 1917. Et ma Fondation Art Russe se spécialise dans une période historique particulière, allant de 1917 à 1991. Nous achetons des peintures et des sculptures qui se sont retrouvées à l’étranger, et nous organisons des expositions dans le monde entier. Nous publions des livres sur les artistes en langues étrangères.
– Le chef-d’œuvre principal de votre collection ?
– Parlez-vous des peintures ou des sculptures ?
– Tout d’abord, des peintures.
– "Encore un 2" de Fiodor Rechetnikov.
– Je m’en rappelle bien. On a écrit une rédaction à ce sujet à l’école. Mais la peinture est depuis un demi-siècle à la Galerie Tretiakov.
– C’est vrai. C’est une copie d’auteur. L’autre, plus ancienne, est chez nous. La veuve de l’artiste l’a vendue en Amérique.
– A un collectionneur privé ?
– Oui. Elle est longtemps restée là-bas, jusqu’à ce que mon agent voie par hasard la toile. En 2012, nous l’avons achetée et envoyée pour examen à Londres. Et il s’est avéré qu’elle a été réalisée deux mois plus tôt que celle qui est conservée à la Galerie Tretiakov !
– Comment l’avez-vous su ?
– Grâce à l’esquisse représentée sur l’arrière-plan d’une autre œuvre de Rechetnikov, "Arrivé en vacances". Elle est aussi sur la peinture de la Galerie Tretiakov, mais sous une forme achevée.
– L’Américain qui a vendu "Encore un 2" ne se doutait donc pas qu’il détenait un tel trésor ?
– Bien sûr que non ! Après, il a failli devenir fou. Une autre histoire intéressante est liée avec une peinture de Vladimir Serov : "Lénine proclame le pouvoir soviétique". La première toile, où derrière Lénine on voit Staline, Sverdlov et Dzerjinski, a été offerte à Mao Tsé-toung. Lorsque Khrouchtchev est arrivé au pouvoir, il a demandé de peindre une nouvelle version, sans Staline. Cette peinture était dans le musée de la ville de Joukovski. Mais une troisième version est encore dans la Galerie Tretiakov. Dans les années 90, le musée de Joukovski a fermé. Ils ont invité de grands collectionneurs du monde, on leur proposait d’acheter quelque chose. C’est comme ça que la toile de Serov s’est retrouvée à l’étranger.
– Aux Etats-Unis ?
– En Hollande. Des années plus tard, le propriétaire a fait le tri dans sa collection. Il est connu, il est spécialisé dans les vieux maîtres. La toile avec Lénine et les bolchéviques n’avait pas d’intérêt pour lui. En outre, il ne comprenait pas sa valeur réelle. Il a appelé mon agent : "Ton client achète des œuvres d’artistes soviétiques. J’en ai une ici dont je n’ai pas besoin…"
– Où sont ces peintures actuellement?
– "Encore un 2" était à Londres pour l’exposition consacrée au 70ème anniversaire de la Victoire. Il va y en avoir une autre, également à l’étranger. "Lénine" attend son exposition.
– Y a-t-il des choses qui vous ont échappées et que vous regrettez ?
– Une peinture d’Alexandre Samokhvalov. Je réagis calmement à ce genre de situation. Non, c’est non. Mais en septembre, la Fondation annoncera une très grosse transaction dans le milieu de l’art. Le monde entier va en parler. Croyez-moi, je n’exagère pas. Mais je n’ai pas encore le droit d’en pulguer les détails.
– Dommage. Passons à la sculpture.
– Dans la collection se distingue particulièrement un modèle en plâtre d’un mètre et demi du "Prolétaire et la Kolkhozienne". Celui qui a été montré à Staline. L’agent l’a trouvé à Londres. La petite-fille de Vera Moukhina le vendait.
– Achetez-vous toujours lors de ventes aux enchères ?
– Principalement à des collectionneurs privés. Lorsque les ventes aux enchères ont lieu, je ne suis pas présent dans la salle. Grâce à mon agent, je négocie parfois par téléphone.
– Le démon du jeu se réveille-t-il parfois à ces moments ?
– Parfois, les émotions jaillissent, le trac. Mais je n’achète rien de manière irréfléchie. Si un travail me plaît beaucoup et que je suis prêt à acheter, alors je fais en sorte de ne pas le rater.
– Où vos premières enchères ont-elles eu lieu ?
– En Amérique. Mon représentant y était, moi à Moscou. Ici, il faisait nuit. Afin de ne pas rester au téléphone, j’ai immédiatement présenté ma gamme de prix. J’étais intéressé par le "Portrait du graveur Watts" de Nikolaï Féchine. Le montant maximal que je m’étais fixé s’élevait à 1,15 millions de dollars.
– Vous saviez que le Féchine serait à vous, à un tel prix ?
– Non. Franchement, je ne connaissais pas le marché des peintures à l’époque. Mon intuition a suggéré que c’était un bon investissement. Lors de la vente du "Graveur", il y a eu une bataille. La vente a été conclue pour 1,05 millions de dollars.
– Est-il arrivé que le prix d’une peinture vous surprenne ?
– Il serait incorrect de nommer son auteur, mais il y a une peinture que je ne voudrais pas mettre dans ma cuisine, même gratuitement! Et elle a été vendue pour 60 millions de dollars. De la folie.
– Quel est votre artiste préféré ? Est-ce Viktor Popkov ?
– Mon préféré est celui dont l’exposition est en cours. Actuellement, c’est Féchine. Mais lors de l’exposition Popkov, je ne pouvais pas penser à d’autres artistes.
– On dit de lui que c’est le "Dostoïevski de la peinture russe".
– Popkov est un génie. Dans ses œuvres, il y a une énergie incroyable. Une profondeur. Prenez "Le pardessus du père", qui est à la Galerie Tretiakov. Le père de Popkov n’est pas revenu du front, mais à la maison il restait son pardessus. Lui-même, encore petit garçon, le mettait et sentait l’odeur d’un être cher. Ces émotions sont à la base de la peinture.
– Popkov a eu une mort regrettable.
– Oui, en 1974. A Moscou, avec des amis artistes éméchés, il a essayé d’attraper un taxi. Et en ville, il y avait une vague d’attaques contre les voitures Volga des convoyeurs de fonds. Popkov a confondu une de ces voitures avec un taxi, et il s’est approché. L’un des convoyeurs de fonds était ivre, il a pris la bande d’amis pour des bandits et a ouvert le feu. Voilà comment on a perdu un peintre de génie, à l’âge de 42 ans.
– Vous êtes-vous heurté à des contrefaçons ?
– Non, j’envoie toujours les œuvres pour expertise à Londres, où tout est étudié, de la poussière à la structure de l’huile. Un jour, j’ai décidé d’acheter une peinture d’Igor Grabar. J’ai vérifié et ce n’était pas Grabar. Les experts pensent que l’auteur était l’un de ses meilleurs élèves. Il n’a pas signé. La signature de Grabar a été imitée plus tard par quelqu’un d’autre. Le travail est incroyable, on ne peut pas le distinguer de l’original. C’est très probablement la famille du célèbre peintre qui a demandé une copie. Puis ils ont pisé l’héritage et quelqu’un l’a obtenu.
– Vous avez reçu votre prénom en l’honneur de votre grand-père, un vétéran de la guerre. Parlait-il de la guerre ?
– Je ne l’ai jamais connu. Je vivais à Dniepropetrovsk, lui au Kazakhstan. Il est mort là-bas quand j’étais tout petit. Mon grand-père avait de nombreuses médailles : l’Ordre de la Guerre patriotique de 2ème degré, deux Ordres de la Gloire, la médaille "Pour le Courage". Il aurait dû obtenir deux de ces médailles, mais il a perdu la deuxième à cause d’une erreur bureaucratique.
– C’est-à-dire?
– Il était artilleur dans une pision de mortiers. En septembre 1943, il a été nominé pour une médaille récompensant la destruction d’un dépôt de munitions nazi, une ordonnance a été signée par le commandant du régiment. Mais le papier n’a atteint l’état-major qu’en décembre. A ce moment-là, mon grand-père se distingua à nouveau dans une bataille et obtint un second ordre d’attribution de la médaille "Pour le courage". Il a dépassé le premier, et de fait l’a remplacé. Le siège n’a pas compris, et a décidé qu’il s’agissait du même exploit. Donc, une seule médaille. Récemment, j’ai appris cette histoire de ma sœur. Elle a réuni les documents et s’est adressée au ministère de la Défense, afin de rétablir la justice
– Il est certainement difficile de vous surprendre avec des cadeaux. Malgré tout, quel est le plus rare que vous ayez reçu ?
– J’ai eu des cadeaux grandioses, mais je me suis excusé et j’ai expliqué que je ne pouvais pas les accepter.
– Pourquoi ?
– Trop cher. Je ne m’étendrai pas sur les détails.
– Vous voyagez beaucoup. Quelle est la petite ville qui vous a fait la meilleure impression ?
– Saint-Jean-Cap-Ferrat. Un endroit merveilleux dans le sud de la France, où l’on voudrait retourner encore et encore.
– Avez-vous acheté quelque chose sur place ?
– Un appartement. Selon les normes de Moscou, c’est-à-dire modeste. Malheureusement, je n’ai aucun moyen d’y aller plus souvent.
– Mikhaïl Prokhorov dit que jamais de sa vie il n’a envoyé de sms ou d’e-mails. Le comprenez-vous?
– Tout à fait ! L’informatique, ce n’est pas mon truc. J’ai un accès rapide à l’information. Si je reçois quelque chose d’important par e-mail, je le lis. Mais créer des comptes dans les réseaux sociaux, je ne veux pas et je ne sais pas faire. J’ai beaucoup d’autres choses à faire.
– Liées aux transports ?
– Aux échecs. J’ai réussi dans les affaires, je suis maintenant un actionnaire, et la gestion opérationnelle a été confiée aux managers de la société. Mais avec la FRE, nous avons des plans ambitieux. Il est nécessaire de ressusciter la gloire nationale dans les échecs, de décrocher des médailles, de former les enfants. Le pays est grand, et l’on ne manque pas de missions.
Iouri Golchak, Alexandre Kroujkov
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